séminaire accueilli par le cehta/ehess
coordonné par anne creissels
maître de conférences en arts plastiques à l'université de lille 3, membre du ceac
docteure de l'ehess en histoire et théorie des arts, chercheure associée au cehta

contact : annecreissels(at)orange.fr
http://compagnieaplusb.blogspot.com

séance du vendredi 6 avril 2012

Sabina Rossignoli, doctorante en anthropologie à l'université Paris Descartes, travaille sur les aspects transnationaux de la danse et sur la distinction (au sens bourdieusien) et la socialité dans les boîtes de nuit antillaises de la région parisienne, sabina.rossignoli(at)gmail.com

« off-stage et on-stage : catégories fluides de la performance »

Il est minuit d’un samedi soir d’automne, dans la banlieue parisienne sud. Dans le grand parking de la boîte de nuit l’Acropol, des groupes de femmes se maquillent, enfilent des talons hauts sur les sièges arrière de leurs voitures. C’est l’anniversaire d’un dj coté de la vie nocturne antillaise et trois mille personnes sont attendues pour le célébrer et assister aux showcase d’artistes dancehall de la Caraïbe française. Ces femmes ajustent leur style vestimentaire à la performance qui suivra au fil de la nuit, la performance du corps sur scène et sur la piste de danse.

Depuis les années 1970, les études subculturelles ont consacré leurs efforts aux styles vestimentaires et aux goûts musicaux des jeunes de la nuit. L’approche bourdieusienne de la distinction a été, dans ce cadre, cruciale pour définir l’importance du capital culturel dans les cultures de la jeunesse. Par contre, peu d’intérêt à été porté à la distinction dans le cadre des pratiques du corps dans ces cultures de la nuit. La vie nocturne antillaise en région parisienne, et particulièrement les pratiques de sociabilité au sein de ces boîtes de nuit, restent des sujets à explorer en anthropologie de la danse.

La compétence dans la danse assure un statut surtout aux femmes, qui ont peu de place dans une industrie culturelle dominée par les hommes. La mise en scène du corps dans l’espace semi-public de la boîte met en relation les nécessités de la respectabilité avec le désir d’émerger par la sensualité. Dans cette perspective, les femmes engagent des codes corporels différents et parfois conflictuels selon la place qu’elles occupent dans l’espace. Cette présentation vise à déchiffrer les motivations de ces femmes et les enjeux de la nuit, en les inscrivant dans la structure socio-économique de l’industrie de la vie nocturne antillaise.